Les acides gras oméga-3 de poisson augmentent-ils le risque de cancer de la prostate ?

Vendredi, 2 Août 2013

Selon les résultats d’une étude récente, une consommation importante d’acides gras oméga-3 de poisson (poisson gras ou complément d’huile de poisson) pourrait faire augmenter le risque de cancer de la prostate.

Source : Journal of the National Cancer Institute, 11 juillet 2013, Brasky et coll.

Commentaire de la Fondation contre le Cancer

Effet positif ou néfaste ?

Le cancer de la prostate est la forme la plus fréquente de cancer chez l’homme en Belgique. Les principaux facteurs de risque sont l’âge et certaines prédispositions génétiques. En ce qui concerne l’influence de l’alimentation, des résultats très divergents ont été publiés.

En 2011 déjà, une étude avait établi que des concentrations élevées d’oméga-3 DHA dans le sang faisaient doubler le risque de cancer de la prostate agressif. Cette conclusion était pour le moins inattendue car, jusqu’il y a peu, les oméga-3 semblaient exercer un effet positif sur la santé, particulièrement en prévention cardiovasculaire. Ces dernières données sont toutefois remises en question par plusieurs études récentes (notamment, N Eng J Med 2013 ; 368 :1800-8) et l’utilisation de compléments d’acides gras oméga-3 n’est plus recommandée en prévention cardiovasculaire.

Une nouvelle analyse des données collectées lors de l’étude SELECT, menée entre 2001 et 2004 auprès de 35 500 hommes, vient d’être réalisée. L’objectif initial était de voir si le sélénium et la vitamine E pouvaient contribuer à prévenir le cancer de la prostate, mais aucun résultat concluant n’a pu être dégagé à ce sujet.

Par contre, les données récoltées ont permis de constater que les hommes dont la concentration sanguine en oméga-3 (EPA, DPA, DHA ; présents dans le poisson) était élevée semblaient courir un risque augmenté de 43 % de développer un cancer de la prostate. Le risque était même augmenté de 71 % pour la forme agressive de ce cancer, et de 44 % pour la forme à évolution lente. L’effet était constaté de manière similaire pour tous les types d’acides gras oméga-3.

En termes d’habitudes alimentaires, les hommes présentant un taux sanguin élevé d’acides gras oméga-3 – et donc un risque élevé de cancer de la prostate – consommaient du saumon environ deux fois par semaine. Le saumon est un poisson gras qui contient plus d’acides gras oméga-3 que les poissons maigres (cabillaud, haddock, sole, raie, merlan…).

Pas de problèmes avec les oméga-3 d’origine végétale ni avec les omega-6

Les acides gras oméga-3 d’origine végétale (ALA, présents dans l’huile de colza, de soja et de lin) semblent – selon la plupart des études – ne pas avoir d’influence sur le risque de cancer de la prostate.

Il existe également des acides gras polyinsaturés oméga-6 (LA ou acide linoléique dans les huiles végétales), présentant des propriétés pro-inflammatoires. Si leur concentration dans le sang est élevée, le risque de cancer de la prostate baisse (de 23 % en moyenne, de 25 % pour la forme à évolution lente). Auparavant, on pensait qu’une consommation importante d’acides gras oméga-3 combinée à une faible consommation d’acides gras oméga-6 faisait baisser le risque de cancer de la prostate. Les chiffres semblent donc désormais montrer le contraire…

Prudence avec les compléments

Le mécanisme par lequel les acides gras oméga-3 provenant du poisson influencent le risque de cancer de la prostate reste à étudier. Il est possible que l’effet négatif de ces acides gras soit dû à leur conversion en molécules capables d’endommager les cellules et l’ADN, et ayant un effet immunosuppresseur.

En conclusion, il semble donc que l’on doive dorénavant déconseiller aux hommes de consommer trop d’huile de poisson, surtout sous forme de compléments alimentaires. Le bon compromis entre risque accru et effet protecteur semble être pour eux une consommation, soit deux fois par semaine, d’une portion de 150 g de poisson maigre ou demi-gras (cabillaud, haddock, sole, raie, merlan, thon, dorade, truite, flétan,…), soit une fois par semaine d’une portion de 150 g de poisson gras (saumon, hareng, sardines, anguille…).

Ce retournement de situation concernant les oméga-3 montre aussi combien il faut rester prudent face aux « modes » alimentaires… Jusqu’à preuve du contraire, équilibre et variété restent les meilleurs conseils.

Alimentation saine : conseils et recettes de la Fondation contre le Cancer